[Expresso] La Commission fédérale de prévention du tabagisme reprend à son compte une revendication de Philip Morris contre le vapotage

« Je veux la législation la plus extrême possible ». En privé, Lucrezia Meier-Schatz, la Présidente de la Commission fédérale de prévention sur le tabagisme (CFPT), lâche sa haine du vapotage et son opposition à toute approche de réduction des risques en la matière. Le récent rapport sur la vape de la CFPT qu’elle a signé contient de nombreuses incohérences et lacunes. Notamment relevées dans le détail par l’association d’usagers Helvetic Vape et l’association des professionnels indépendants de la vape SVTA. Une de ses recommandations est particulièrement incongrue: l’exigence de taxer le vapotage au même taux que les cigarettes. Alors que le parlement a voté en 2011 l’exonération de taxe punitive sur le vapotage, pour encourager l’arrêt du tabac, il est de notoriété publique que Philip Morris milite activement pour une taxation anti-vape.
Au Royaume-Uni, la consultation publique montre l’argumentation du cigarettier lausannois pour demander d’augmenter les taxes sur la vape plutôt que sur les cigarettes. En Italie, après la rencontre d’André Calantzopoulos, le PDG de Philip Morris, et du premier Ministre Matteo Renzi, une taxe anti-vape a été mise en place par le gouvernement, publiée au journal officiel le 23 décembre (sic!) 2014. Un beau cadeau à Philip Morris s’est exclamé la presse transalpine. Depuis, les deux dirigeants ont inauguré ensemble deux nouvelles usines Philip Morris dans la péninsule. Au niveau européen, la Commission européenne a mis à son agenda l’étude d’une telle taxation punitive à la demande des cigarettiers selon le Times du 2 mars 2016.
Le Times du 2 mars 2016
Une telle taxe en Suisse ferait au moins doubler le prix de vente des produits de vapotage. Un frein évident à leur adoption par des fumeurs pour sortir du tabagisme. Alors que la consommation de tabac à rouler, connue pour être privilégiée pour son faible coût, explose en Suisse particulièrement chez les jeunes. Un signe d’un potentiel pour tirer ces fumeurs vers des produits de non-tabagisme, comme la vape, à un prix abordable. 
Mais alors comment comprendre que la CFPT soutienne les mêmes revendications que la multinationale tabagique vaudoise? Effet de corruption? Incompétence abyssale sur la problématique? Œillères idéologiques et haine des fumeurs projetée à présent sur les ex-fumeurs que sont les vapoteurs? Bien que la liste d’intérêts de l’ex-députée démocrate-chrétienne Meier-Schatz est longue comme le bras. Et même si on peut noter que les liens d’intérêts de représentants de groupes sponsorisés par le lobby pharmaceutique ne sont pas déclarés sur la page de la CFPT. Il semble plus probable que ce soit un mélange d’idéologie obscurantiste et d’un culte de la fainéantise qui a amené la CFPT a dédaigné étudier la question sérieusement et rejeter la lecture incontournable de rapports scientifiques comme ceux du Public Health England ou du Collège Royal de médecine
Ce serait donc plus la stupidité qui ferait adhérer la CFPT aux objectifs de Philip Morris. Les restrictions contre le vapotage soutenues par les anti-tabac fondamentalistes font le jeu des cigarettiers, comme le relève la chronique du jour Nota Bene sur la radio RTS La première. « La législation sur l’ecig se dirige vers des certifications technico-médicales hyper restrictives. Cela écrémera la concurrence, car seuls les riches pourront supporter les coûts d’homologation », explique le journaliste Fabrice Gaudiano. Avant de poursuivre, « les cigarettiers font là encore très fort grâce à un lobbying intense (…) au nom de la santé et de la sécurité » pour restreindre le marché à leurs seuls produits. Les usagers se laisseront-ils faire? Malgré le soutien incongru de la Commission de prévention du tabagisme à la firme de Marlboro, la partie n’est de loin pas gagnée d’avance pour le système tabagique face à la résistance citoyenne, comme le souligne le Pr Kevin Fenton du Public Health England.

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