La Commission Européenne analyse les réponses à son projet de taxes selon les liens d’intérêts sauf pour l’industrie du cancer

Analyse orientée de la Commission européenne des réponses à la consultation publique
La Commission Européenne a fait son rapport sur les contributions à sa consultation publique estivale sur les taxes tabac et son projet d’imposer une taxe anti-vape. Elle avait déjà publié les résultats statistiques en septembre : près de 90% de participants s’opposent à l’assimilation de la vape aux produits du tabac et à ses taxes punitives. Au-delà des chiffres, la Commission propose une analyse d’opinions, dont le Vaping Post fait un compte-rendu en français. « Comme l’on pouvait s’y attendre avec ce genre de consultation publique, chacun a défendu ses intérêts et campé sur ses positions », résume Alistair Servet pour le site spécialisé. Mais les liens d’intérêt sont-ils vraiment analysés par le rapport de la Commission?

Pas de baisse du taux de sophisme en Europe cette année

Le rapport de la Commission a catégorisé les réponses par liens d’intérêt supputés des participants individuels (hors organisation). Bien que seuls 1,77% des participants ont déclaré être vapoteurs lors de l’enquête, la Commission a considéré comme parties prenantes liées d’intérêt pour la vape, tous les participants individuels donnant des réponses s’opposant aux mesures anti-vape. « Le taux de réponse élevé parmi les citoyens s’explique principalement par la pétition parallèle lancée par diverses organisations de consommateurs de vapotage. La pétition a attiré 50’000 supporters qui ont également été invités à participer à la consultation publique pour «défendre le droit d’accès au vapotage sans taxe dans toute l’Europe» », précise le rapport de la Commission.
Justifiant à ses yeux que « les commentaires de plus de 10’000 citoyens européens ayant pris part à la consultation publique devraient être considérés représentant principalement les points de vue des communautés soutenant la vape ». Voyons, comment ça marche? Vous déclarez être pour l’abolition des taxes sur les serviettes hygiéniques, donc vous êtes une femme féministe, donc c’est normal que vous soyez pour l’abolition des taxes sur les serviettes hygiéniques. Le jeu est facile, vous pouvez essayer avec d’autres choses, ça marche bien pour dénier a priori toute réflexion à quelconque prise de position en l’accusant de prendre cette position par intérêt. La preuve d’un lien d’intérêt? Tu as pris cette position.

Citoyens égaux mais un peu moins quand même

La Commission concède que « la nature et le but d’une consultation publique ouverte sont, non pas de fournir une statistique significative de la population de l’UE (…), mais de permettre à toutes les parties prenantes de donner leur point de vue sur la politique de l’UE ». Mais en rappelant avec insistance qu’il « est essentiel de garder à l’esprit ce biais pour une analyse et une interprétation correctes des réponses ». En somme, on l’aura compris, l’interprétation correcte est donc que seuls des vapoteurs peuvent se soucier de réduction des risques sur la question. Honnêtement, je ne sais pas comment doivent le prendre les non-vapoteurs?
87 % des européens considèrent que la vape n'est pas un produit de tabac
D’accord, on ne va pas nier qu’il y a eu plus que probablement une forte participation de vapoteurs à la consultation. Même s’il est difficile de la comptabiliser précisément et qu’elle ne correspond pas au nombre de signatures de la pétition. Mais la catégorisation faite par la Commission pose tout de même deux questions de fond: les vapoteurs sont-ils des citoyens un peu moins égaux que les autres lorsqu’ils exercent leur droits civiques et expriment leur opinion, après y avoir été invités par la Commission, sur un sujet qu’ils connaissent d’expérience et pour lequel ils sont directement concernés? Les avertissements du rapport de la Commission laissent planer un doute sur le sujet.

Pas vu, pas pris?

L’autre question concerne l’inégalité de traitement des répondants dans la manière de catégoriser. La Commission distingue les parties liées au vapotage, celles liées au tabac, puis une catégorie « santé publique ». La réduction des risques est-elle d’office hors du champ de la santé publique pour discriminer l’une de l’autre? Cela ressemble plus à une pétition de principe de la Commission qu’à quelque chose de fondé en termes de santé publique.
Les 50 organisations élues à la catégorie ‘santé publique’ sont-elles toutes sans lien d’intérêt avec quelconque entreprise pouvant bénéficier du tabagisme? Les organisations recluses dans le sac « autres » sont-elles dénuées d’intérêt pour la santé publique? Le rapport de la Commission ne permet pas de le savoir. L’absence de précision doit-elle laisser supposer qu’aucune organisation sponsorisée par des firmes d’anti-cancéreux, financée par l’affairiste Michael Bloomberg ou encore dépendante des subventions et des désirs de la Commission Européenne n’a été labellisée ‘santé publique’? hum… On peut être pris de doutes. En gardant le silence sur ce chapitre, alors qu’il a pris pour angle les liens d’intérêt, le rapport ne lève pas les zones obscures des intérêts sur le dossier.
Quitte à prendre le parti d’analyser les réponses selon des liens d’intérêts supputés, il aurait été intéressant que la Commission aille au bout de cette logique. Elle aurait pu analyser le schisme qui traverse le camp des 50 organis
ations qu’elle a qualifié de « santé publique » concernant les produits de réduction des risques. Elle note pourtant en conclusion que « les positions des parties prenantes de la santé publique sur ce sujet ne sont toujours pas uniforme ». Mais les intérêts qui président à ces différentes positions restent dans l’ombre dans ce rapport qui semble surtout tenter de justifier ses a priori sur les participants.

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