La fraude de Stanton Glantz sur le risque de crise cardiaque avec la vape démasquée

L’AFP publiera t-elle un correctif ? Le hoax sur l’accroissement des risques de crise cardiaque à cause du vapotage est démasqué. Largement relayé par la presse, l’ingénieur Stanton Glantz, de l’Université de San Francisco, affirme que la vape double le risque de crise cardiaque. Mais comme cela était soupçonné par de nombreux scientifiques, son étude co-signée avec Dharma Bhatta dans la revue de l’American Heart Association (AHA) est frauduleuse. Les Prs Brad Rodu et Nantaporn Plurphanswat, de l’Université de Louisville, ont épluché les données brutes de l’enquête Population Assessment of Tobacco and Health (PATH) sur laquelle Stanton Glantz s’est appuyé. Résultats: sur les 38 cas de vapoteurs ayant eu des crises cardiaques recensés, la plupart les ont eu avant de vapoter, en moyenne plus de dix ans avant.

Ce 11 juillet, les scientifiques de l’Université de Louisville ont fait une demande officielle de rétraction de l’article à l’AHA. « Les auteurs de l’étude ont échoué à prendre en compte l’information détaillée de cette enquête sur (a) le moment où les participants ont été informés pour la première fois qu’ils ont eu une crise cardiaque ; et (b) du moment où ces participants ont commencé à utiliser le vapotage », expliquent les Prs Brad Rodu et Nantaporn Plurphanswat dans leur lettre à l’AHA, que nous avons pu consulter. 

« En résumé, les vapoteurs sont beaucoup moins enclins à avoir une crise cardiaque, et n’ont surement pas le double de risque »

Les deux chercheurs de l’Université de Louisville ont même refait les calculs de risque de crise cardiaque chez les vapoteurs par rapport au reste de la population. « Lorsque les vapoteurs actuels qui ont eu une crise cardiaque avant de vapoter ont été correctement reclassés comme non exposés, l’odd ratio (OR) pour les vapoteurs quotidiens est de 0,69 (IC = 0,22 – 2,12) et pour les vapoteurs occasionnels de 0,18 (IC = 0,05 – 0,66) », précisent les chercheurs. « En résumé, les vapoteurs sont beaucoup moins enclins à avoir une crise cardiaque, et n’ont surement pas le double de risque »

En réponse, Stanton Glantz a invoqué une analyse secondaire dans l’étude publiée par l’AMA. Mais Brad Rodu et Nantaporn Plurphanswat ont également analysé celle-ci. « À la page 9 de leur article, Bhatta et Glantz disent qu’ils ont utilisé les questions relatives à l’âge de la première crise cardiaque et à l’âge de la première utilisation de vapotage de l’enquête PATH afin de « résoudre ce problème » de temporalité. Leur solution était de « sélectionner uniquement les personnes qui ont eu leur premier infarctus du myocarde en 2007 ou après cette date » (n=16, tableau S6). Nous avons également reproduit cette analyse secondaire. Nous avons constaté que plus du tiers des 16 vapoteurs actuels ont d’abord appris qu’ils avaient eu une crise cardiaque des années avant de commencer à vapoter. Nous concluons que l’analyse secondaire n’a pas du tout réglé le problème. En fait, il se peut qu’elle ait induit en erreur les éditeurs, les relecteurs et les lecteurs », expliquent-ils dans une seconde lettre envoyée hier à l’AMA.

Ce n’est pas une erreur, c’est un mensonge

« L’inclusion de cette analyse secondaire est la preuve que Bhatta et Glantz savaient que de nombreux vapoteurs actuels ont eu une crise cardiaque avant de commencer de vapoter », soulignent Brad Rodu et Nantaporn Plurphanswat. L’affirmation de Stanton Glantz et Bathra Bhatta que la vape est un facteur de risque accru de crise cardiaque ne tient pas. « Les principaux résultats de l’étude de Bhatta et Glantz sont erronés et invalides. Leur analyse est une violation indéfendable de toute norme raisonnable de recherche sur l’association ou la causalité », insiste le courrier des Prs Brad Rodu et Nantaporn Plurphanswat à l’AHA.

Dans un article avant-hier du journal USA Today (*) à propos de cette plainte, le Pr Raymond Niaura, de l’Université de New-York, confirme l’absence de rigueur et de preuve des affirmations de Stanton Glantz. Ayant également réanalysé pour vérification des études sur les liens entre vapotage et crise cardiaque, le chercheur conclue: « nous n’avons trouvé aucune relation entre vapotage et crise cardiaque. Nous ne sommes tout simplement pas en mesure de répondre à la question fondamentale de ce qui est survenu en premier ».

Le réel danger cardio-vasculaire est le monoxyde de carbone

Une fois dévoilée la fraude de Stanton Glantz et Bathra Bhatta pour gonfler le nombre de vapoteurs, il resterait une dizaine de cas de crises cardiaques de vapoteurs dans le suivi PATH (qui comprend plus de 25’000 américains). D’autres facteurs tout autre que leur vapotage peuvent être impliqués dans ces crises: à commencer évidemment par leur tabagisme passé, comme le soulignait le Pr Carl Philipps sur les recherches à ce propos. En l’état des connaissances, non seulement rien ne prouve un risque accru de crise cardiaque lié au vapotage, mais rien n’indique même qu’il y a une inquiétude à avoir sur cette question. 

Le monoxyde de carbone dégagé en masse par la fumée de cigarette reste le principal facteur de détérioration cardio-vasculaire lié au tabagisme. Il est totalement absent du vapotage. Le message salutaire essentiel à donner aux fumeurs cardiaques reste d’arrêter de fumer. Le vapotage peut aider certains d’entre eux pour quitter la cigarette. Affirmer le contraire est irresponsable et criminel. Les médias qui ont colporté les propos frauduleux de Stanton Glantz se doivent de corriger cette désinformation.

(*) Conflits d’intérêt croisés

USA Today a choisi de dramatiser la nouvelle sous forme d’opposition de personnes entre Stanton Glantz et Brad Rodu. Une large part de l’article concerne les potentiels conflits d’intérêt des deux protagonistes.

D’un côté Brad Rodu, à qui il a été refusé des crédits pour des recherches sur le snus qu’il voulait mener dans les années 1990′, a accepté des aides financières de firmes cigarettières. Depuis, les données épidémiologiques en Suède ont confirmé le bien-fondé de ses travaux sur la forte réduction des risques du snus.

De l’autre, Stanton Glantz, ingénieur aéronautique, s’est reconverti dans la lutte anti-tabac durant les années 1990′ à l’aide de financement des firmes pharmaceutiques telles que Johnson & Johnson. Actuellement, il bénéficie de deux crédits fédéraux de 20 millions $ chacun, l’un du NIH, l’autre pour des recherches anti-tabac et anti-vape de la FDA. Accusé d’harcèlement sexuel et de discrimination raciste par plusieurs de ses étudiantes, il a négocié un arrangement financier pour stopper les poursuites en justice de ses victimes.

Happening contre l’impunité de Stanton Glantz

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