"Les preuves s’accumulent: vapoter est définitivement plus sûr que fumer" assure la Pr Linda Bauld

Le grand public francophone doit espérer de meilleures années pour bénéficier d’un tel éclairage. Au seuil de la nouvelle année et des bonnes résolutions qui l’accompagnent, le Guardian publie un article d’information de santé publique de première importance.  Le texte de la Pr Linda Bauld fait le point sur les avancées en 2017 des connaissances sur le vapotage et sa réduction des méfaits pour sortir du tabagisme. Professeure de politique de santé à l’Université de Stirling, directrice adjointe du Centre d’études sur le tabac et l’alcool britannique et titulaire d’une chaire au Cancer Research britannique (CRUK), Linda Bauld est une des bêtes noires de l’industrie du tabac depuis de longues années. Son article s’inquiète de l’écart toujours plus grand entre la réalité des connaissances scientifiques sur le vapotage et la désinformation sensationnaliste des médias protégeant de facto le tabagisme.

L’industrie du doute
Faits divers montés en épingle, comme les rares accidents liés aux batteries, fantasme infondé d’épidémie tabagique chez les jeunes, pseudo-science faisant brûler des vapoteuses pour mesurer d’irréalistes dégagements toxiques, voire diffusion de mensonges caractérisés par des sites complotistes fantasmant l’apparition de maladies inexistantes… Le bombardement soutenu de désinformations anxiogènes pour convaincre les fumeurs de rester aux cigarettes est quotidien. Pourtant la réalité est à l’opposé de cette représentation médiatique. « Au cours de la dernière année, plus que toute autre, la preuve que l’utilisation du vapotage est beaucoup plus sûre que de fumer n’a cessé de s’accumuler », explique la Pr Linda Bauld, donnant des exemples d’études significatives de l’année écoulée.
Evénement rarissime en France en 2017, une explication claire de la réduction des méfaits par la tabacologue Marion Adler dans une émission télé:
Une réduction des méfaits similaire aux substituts nicotiniques
La première étude de l’usage à long terme du vapotage montre que les niveaux d’exposition de toxiques chez les vapoteurs et les utilisateurs de substituts nicotiniques pharmaceutiques (gommes, patchs…) sont équivalents. « Financée par le Cancer Research UK, l’étude a trouvé de grandes réductions de carcinogènes et d’autres composés toxiques chez les vapoteurs par rapport aux fumeurs, mais seulement si l’utilisateur arrête complètement de fumer », précise la scientifique. Un autre rapport s’appuyant sur les données existantes évalue le risque cancérigène de vapoter à moins de 1% de celui de fumer, rappelle t-elle aussi. [Plus précisément, le calcul de ce rapport en l’état des connaissances actuelles aboutit à un risque de 0,4%, soit 250 fois moins de risque en vapotant qu’en fumant – voir notre recension du rapport]. 

Les données du suivi sur la réduction des toxiques liée à l’utilisation du vapotage (EC) en comparaison avec les cigarettes et les substituts nicotiniques (NRT) ainsi que les doubles utilisations 
Ces résultats n’ont rien d’inattendu en regard de la rupture technique apportée par le vapotage. « En retirant le tabac et la combustion, il n’est guère surprenant que le risque
est réduit. 
Cela ne signifie pas que le vapotage soit totalement inoffensif. 
Mais cela signifie que nous pouvons être relativement confiants que le passage du tabagisme au vapotage aura des avantages pour la santé », souligne Linda Bauld. Etant entendu que rien n’est totalement inoffensif, la précaution semble surtout de langage. 

Ces éléments scientifiques ont amené plusieurs organisations de santé à rejoindre le consensus en faveur de la réduction des méfaits avec la vape, notamment le Royal College of General Practitioners, la British Medical Association ainsi que les organisations écossaises regroupées dans le Health Scotland. Stoptober, la campagne annuelle anglaise pour soutenir les fumeurs à s’en sortir, a pleinement intégré cette année le vapotage à ces outils d’aide.
La Nouvelle-Zélande vers la réduction des méfaits

Hors du Royaume-Uni, l’intégration du pilier de la réduction des méfaits avec le vapotage propulse la Nouvelle-Zélande à la pointe des politiques de santé publique concernant le tabagisme. Le cas néo-zélandais est particulièrement frappant puisque ce pays suivait une politique puritaine unidimensionnelle jusque-là. Or, c’est bien l’impasse et les effets contre-productifs de ce paradigme, notamment contre les groupes sociaux défavorisés, qui l’ont amené à embrasser cette nouvelle approche. On a envie d’ajouter aux exemples présentés par Linda Bauld, la prise de position tranchante de la Fédération des professionnels des addictions pour une refonte de la politique sur le tabagisme en Suisse.

Le conservatisme tabagique
A l’opposé de ces initiatives novatrices, des pays et des organismes se maintiennent dans une politique contre la réduction des méfaits. Il est notable que ces politiques conservatrices sont généralement accompagnées d’un maintien du tabagisme comme en Suisse, en France ou en Australie, tandis que le Royaume-Uni a vu son tabagisme fondre de plus de 20% depuis 2011 sous l’impact du vapotage. 
Linda Bauld pense qu’un des motifs de ces positions est liée à la peur d’un risque de tabagisme chez les jeunes. « Cette année, nous avons vu des recherches suggérant que certains adolescents qui expérimentent le vapotage vont ensuite fumer lorsqu’ils sont suivis un an plus tard, dont une étude au Royaume-Uni. Il semble y avoir peu de doute qu’il existe des groupes de jeunes susceptibles des deux. Pourtant, ces études ne prouvent pas que c’était l’acte d’essayer le vapotage qui a conduit
au tabagisme ultérieur – de nombreux autres facteurs peuvent expliquer cela, y compris le simple fait que le tabac est toujours largement disponible »
, explique t-elle. 
La confusion contre les faits
Le problème classiquement connu sous le nom de facteur confondant est à la racine de la vieille pseudo-théorie de l’effet passerelle, décortiquée par un article du Pr Jean-François Etter publié aussi cette année. L’accusation implicite des « pro-abstinence only » d’un vapotage inventeur du tabagisme chez les ados ne semble pas résisté aux faits. Dans les pays où le vapotage est développé, comme le Royaume-Uni ou les Etats-Unis, « les taux de tabagisme chez les jeunes continuent de baisser à un rythme encourageant. Si le vapotage provoquait le tabagisme, ces tendances s’inverseraient », pointe Linda Bauld.
En soutien à ce constat de bon sens, la plus grande étude au monde à ce jour sur le vapotage et les jeunes, comprenant plus de 60’000 adolescents, a été publiée en 2017. « Elle fait le constat que, bien que l’expérimentation de la vape existe chez les jeunes, l’utilisation régulière par les adolescents qui n’avaient jamais fumé reste très faible, à moins de 1% », rappelle la professeure de santé publique.
En 2018, arrêtez de vous faire enfumer !
On le voit, le gouffre entre les recherches scientifiques et les messages des médias est énorme. Fruit pourri de cette désinformation, la part de fumeurs convaincus à tort d’un danger du vapotage équivalent au tabagisme progresse ces dernières années. Sensationnalisme, conflits d’intérêt ou arriération idéologique, les causes à cette morbide violation éthique se conjuguent probablement pour protéger le tabagisme et nuire à la population. 
« Quel moyen a le fumeur pour faire face à la controverse continue et l’intérêt insatiable de la presse sur le vapotage? Qui devrait-il croire? De bonnes sources d’information existent mais elles ne sont pas assez mises en avant. Nous avons besoin d’informations publiques claires, provenant de sources fiables, pour crier au-dessus du bruit et présenter les faits. Et ça, ce sont les faits: Si vous fumez, la meilleure chose à faire pour votre santé et celle de votre entourage est d’arrêter de fumer. Si vous choisissez de vapoter pour arrêter de fumer, c’est génial, et personne ne devrait vous critiquer pour ce choix », explique Linda Bauld en guise d’encouragement aux fumeurs se décidant à de bonnes résolutions.

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Quelques liens francophones utiles (liste vraiment non exhaustive… ):
Un clip de la Ligue nationale contre le cancer en France:
PS : l’excellent film Vape Wave est diffusé sur la chaîne LCP le dimanche 7 janvier à 20h45

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