Suisse : Le tabagisme stagne-t-il depuis l’abrogation de la prohibition des e-liquides nicotinés ?

En dépit des résultats des essais cliniques, dont celui mené en Suisse, les opposants à la réduction des risques en Suisse prétendent que le vapotage n’aide pas à arrêter de fumer. La preuve selon eux ? Le tabagisme aurait stagné depuis l’apparition de la vape en Suisse. C’était notamment l’argument du socialiste bernois Hans Stöckli au Conseil des États pour soutenir le vote de la surtaxe antivapoteurs au printemps 2023. Pourtant, depuis, la publication des données officielles montre que le tabagisme a régressé de 12 % entre 2017 et 2022, passant de plus de 27 % à moins de 23 % des plus de 15 ans en Suisse. La fin des interdictions de vente des e-liquides nicotinés en 2018 et du snus en 2019 ont-elles joué un rôle dans cette baisse après plus d’une décennie de stagnation du tabagisme ?

Après avoir stagné dix ans, le tabagisme a baissé de 12 % depuis 2017

Selon l’Enquête Suisse de la Santé (ESS), alors que la part de fumeurs de plus de 15 ans dans la population a stagné à plus de 27 % de 2007 à 2017, elle a chuté à 23,9 % en 2022. L’écart représente environ 300 000 personnes, sur environ 7,2 millions de plus de 15 ans résidant en Suisse.

Au cours de cette dernière période, les deux seuls événements concernant la réglementation du tabac ou de produits connexes, sont les abrogations de la prohibition de la vente d’e-liquides nicotinés par le Tribunal administratif Fédéral (TaF) en 2018 d’une part, puis celle de l’interdiction de la vente du snus par le Tribunal fédéral (TF) l’année suivante d’autre part. Aucune mesure particulière ni hausse de taxe sur le tabac n’est entrée en vigueur durant ces cinq années.

La corrélation est flagrante et l’évolution du tabagisme mesurée par l’Office fédéral de la statistique (OFS) invalide complètement l’argument des élus socialistes pour surtaxer le moyen de réduction des risques. L’accès légal aux e-liquides de vape avec nicotine est associé à une chute du tabagisme.

Cependant, on ne peut pas en conclure ipso facto que les abrogations des prohibitions des deux produits de réduction des risques sont les causes de cette baisse ni préciser le cas échéant leurs parts d’impact respectives. Bien que cela paraisse très probable qu’ils soient au moins en partie responsables de la réduction du tabagisme, démontrer leur rôle causal demande plus d’éléments.

3 % de vapoteurs dans la population en Suisse

Or, dans les documents publiés par l’OFS, les données sur les usages du vapotage et du snus sont extrêmement lacunaires. Une seule mention sans plus de détails se trouve à la page 13 de la « Vue d’ensemble » de l’ESS 2022.

« Au total, 3% de la population utilisaient des cigarettes électroniques en 2022, fumeurs et non-fumeurs confondus. Leur consommation est plus fréquente chez les hommes et les femmes de 15 à 24 ans (respectivement 5% et 6%). Les adeptes du snus (tabac à sucer) sont essentiellement des hommes jeunes: 11% des 15 à 24 ans en consommaient en 2022. »

Office fédéral de la statistique, Vue d’ensemble de l’Enquête Suisse sur la Santé 2022.

En miroir, on notera que les 15 à 24 ans ont vu leur tabagisme baisser de 31,7 % en 2017 à 25,8 % en 2022, soit une chute de plus de 18 % de tabagisme dans cette tranche d’âge. Tandis que le vapotage concerne 5,5 % d’entre eux, selon cette unique et courte évocation dans l’ESS. Même si la nature du lien entre vape et baisse du tabagisme reste indéfinie avec ces données, le fait est que le tabagisme des jeunes recule fortement depuis l’apparition de la vape.

Cultiver l’ignorance de la population

Dans les données disponibles de l’ESS, rien ne précise la part d’ex-fumeurs chez les vapoteurs et chez les utilisateurs de snus, ni la fréquence de leur usage. On ne peut pas dire grand-chose de plus de manière sensée à partir de ces bribes statistiques. Bien que le libellé laisse penser que l’OFS a des données plus précises sur ces usages, ma demande de complément a essuyé un simple renvoi vers les documents déjà publiés. Aucun tableau statistique sur les utilisateurs de snus ou de vape n’est publié, et a fortiori d’analyse plus pointue.

La question de la nature du lien entre la baisse de tabagisme depuis 2017 en Suisse et les usages de produits de réduction des risques dont la vente a été légalisée reste ouverte. Par contre, les données montrent indiscutablement un changement de dynamique après dix ans de stagnation du tabagisme, il chute et de manière forte chez les jeunes. Des analyses sérieuses sur ce sujet de santé publique majeur ne sont pas disponibles en Suisse. Restent donc les bobards politiciens.

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